Affaire Cour africaine des droits de l’Homme,  Abidjan rattrapée par un amateurisme juridique

    Une petite réflexion sur le retrait de la déclaration de compétence de la Côte d’Ivoire  de la Cour Africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP).

    « Le gouvernement ivoirien a décidé le mardi 28 avril 2020, de retirer la déclaration de compétence prévue au protocole relatif à la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples, qu’il a émise le 19 juin 2013 », extrait du communiqué du gouvernement.

    Et les raisons évoquées : les agissements de la CADHP portant « atteinte à la souveraineté de l’Etat de Côte d’Ivoire, à l’autorité et au fonctionnement de la justice mais sont également de nature à entrainer une grave perturbation de l’ordre juridique interne des Etats ». Cette décision fait suite à l’ordonnance provisoire de la CADHP du 22 avril 2020 qui « ordonne à l’Etat défendeur de surseoir à l’exécution du mandat d’arrêt émis contre Guillaume Kigbafori Soro ». C’est un fait inédit qui vient de se produire dans notre pays.

Affaire Cour africaine

    Au-delà, de l’ordonnance de la CADHP et de l’affaire  Guillaume Soro, ce sont les citoyens ivoiriens et toutes les organisations non gouvernementales qui sont privés désormais de cette institution juridique africaine. Je voudrais le dire haut et fort, nos gouvernants nient l’intérêt général, et tous les droits du peuple ivoirien.

     La vie d’une Nation ne se limite pas à des mandats d’arrêt, à des affaires de détournements de fonds, mais s’étend aussi à des affaires environnementales, économiques que des ONG peuvent porter devant la CADHP. Le gouvernement a-t-il bien cerné tous les contours de ce protocole avant de s’engager ?

    Le ministère de la Justice et des droits de l’Homme d’alors  a-t-il suffisamment étudié tous les protocoles et textes de la CADHP avant une quelconque adhésion ? A-t-on fait preuve de suivisme juridique ? N’est-ce pas faire preuve d’amateurisme juridique ? Il faut peser le pour et le contre d’un projet avant de s’engager.

Affaire Cour africaine

Le gouvernement était-il vraiment pour les droits des ivoiriens en adhérant à la CADHP ? L’une des explications données par le gouvernement ivoirien pour dénoncer l’accord est l’atteinte à la souveraineté. Dans ce cas précis, le président de la République serait le premier à  porter un coup à la souveraineté de notre pays. A savoir que lors de son discours du 6 août 2018, il déclarait à la Nation ceci : « Cependant comme le recommande notamment la Cour Africaine des droits de l’homme et des peuples, j’ai instruit le gouvernement à l’effet de réexaminer la composition de la Commission électorale indépendante ».

    Cet acquis a été une victoire pour les organisations de la société civile qui avaient porté l’affaire à la CADHP.

    Alors, pourquoi à cette époque, avoir accepté cette recommandation de la CADHP ? Le chef de l’Etat pouvait prétexter que la CADHP n’a pas s’immiscer dans les affaires intérieures du pays. Et se justifier de la souveraineté de la Côte d’Ivoire à gérer ses organes et  institutions. Nous pouvions déjà nous retirer de la CADHP, car nous sommes indépendants et un pays de dialogue qui peut régler ses questions électorales sans l’immixtion du voisin ou de toute autre instance. Les uns et les autres ont-ils pris conscience de la force et de l’ancrage de cette Cour sur le fonctionnement de notre Etat ?

  Monsieur le président de la République, en capitulant sur le cas la CEI, vous aviez ouvert la boite de Pandore. Si le premier des ivoiriens se plie aux injonctions de la CADHP, il donne le bon exemple donc c’est un boulevard pour les citoyens et les ONG. Rappelez-vous également de vos propos, Monsieur le président de la République, le 21 mai 2011 à Yamoussoukro : «  A l’Union Africaine, la Cedeao, l’Union Européenne, j’exprime la gratitude du peuple ivoirien pour avoir accompagné la Côte d’Ivoire dans sa quête difficile de la paix ».

    Aujourd’hui, également nous avons besoin de ces mêmes institutions pour une paix et un développement harmonieux. A ce stade de mes propos, je souhaiterais que nos populations soient mieux instruites sur les instances internationales, juridiques et les traités ratifiés  par le gouvernement. Que les partis politiques, les députés, la société civile, le gouvernement s’y emploient à cette formation. Ce pan de ma proposition me permet d’aborder le fonctionnement de la CADHP.

    En effet, il faut savoir que dans l’ordonnance de ladite Cour délivrée le 22 avril 2020 dans l’affaire Guillaume Soro, des correspondances ont été faites entre la Cour et l’Etat défendeur, à savoir le gouvernement ivoirien. Dans un document de 11 pages, la CADHP expose son argumentaire juridique ponctué par l’ordonnance à l’Etat défendeur. Nous livrons quelques parties de ce document.

Affaire Cour africaine

Au chapitre 3 : « Résumé de la procédure devant la Cour » au point 10 : « Le 25 mars 2020, l’Etat défendeur a soumis ses observations sur la demande de mesures provisoires. Toujours dans le contenu, au chapitre 5 : « Sur la compétence de la Cour » au point 15 : « L’Etat défendeur n’a pas fait d’observations sur ce point ».

    Au travers de ces quelques éléments, il faut savoir que l’ordonnance de la Cour n’est pas tombée du ciel et que chaque partie a avancé ses arguments et que la Cour a tranché tout simplement. Il y a eu des correspondances entre la Cour, l’Etat défendeur et l’ex-président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro.

    Une fois de plus, gérer un Etat ce n’est pas de l’improvisation politique, ni du suivisme, encore moins  faire du cosmétique juridique. Avec tous ces faits, pourrions-nous faire un plaidoyer auprès du président qui sera élu, pour revenir à la déclaration de protocole de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des peuples, avec la pirouette politicienne de nos leaders qui ressurgit à tout moment ? Y-a-t-il péril en la demeure avec les autres Cours et traités internationaux ?

     Je terminerai mon analyse par un verset biblique pour faire comprendre qu’il faut être au service du peuple en tant qu’une lumière pour éclairer les mentalités. « On n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais on la met sur le chandelier et elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison », Mathieu 5 V 15.

N’Dri Koffi

Lemediacitoyen.com

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