De la politisation de l’index dressé : jeux de mains, jeux de vilains/ par  Prof Alger Jean-Francis Ekoungoun

La menace formulée par la ministre de l'Education nationale, de radier les grévistes a suscité diverses réactions dans l'opinion. (DR)

Dans cette chronique, le professeur de lettres, Alger Jean-Francis Ekoungoun, comparatiste, fustige la stratégie de la menace brandie par la ministre ivoirienne de l’Education nationale, Kandia Camara, devant la menace de grève des enseignants. Il ne la nomme pas. Mais l’allusion est frappante. Avec un style ironique, satirique. Nous publions son texte avec son accord.

 

Ce petit doigt toujours pointé dans le ciel des incertitudes de l’Ecole de la république, personnellement, me pose problème. Ce matin j’ai revu la photo de son index qu’elle encore dressé devant des caméras. Ce doigt levé finira par devenir canonique dans les annales de ce ministère qui peut bien s’en passer.

Décryptage.
Comparatiste de formation et de profession, je suis enclin à chercher les sources et les influences de certaines praxis. Ce petit doigt dressé est-il un « habitus » religieux (un concept flottant que j’entends fort bien dans la grille d’analyse Bourdieusienne). Habitus qui trouverait sa résémantisation dans le dogme du « Chahâda ». Dans la profession de foi dans l’Islam, l’index levé symbolise l’unicité d’Allah.

Quand il ne tient pas de la menace, ce petit doigt est signe de piété. Cet index dressé en cette période de Ramadan devrait avoir le sens d’une invocation à Allah, le Miséricordieux pour sortir le système éducatif ivoirien de la tourmente. On l’applaudirait de nos dix doigts si tel était le cas.

Quant cet index pointé tient de la menace, à la guerre comme à la guerre. Un glissement martial faisant appel à la notion de « guerres justes », concept qui trouve dans le « Jihadisme » son paradigme le plus achévé. Dans le Jihad, la référence à la « Chahâda » est fondamentale. Elle renvoie à l’idée de martyr. Les musulmans récitent la chahâda sur leur lit de mort le doigt levé, et dans un contexte jihadiste, cela peut signifier qu’on est prêt à mourir pour sa cause dans l’instant.

Une guerre fut-elle déclarée « juste » ou pas finira toujours autour d’une table de discussions. Qui plus est, les doigts d’une dame se dressent gracieusement pour être bisoutés et non pas pour faire la guerre.

Chère madame, j’ose croire que votre index, aussi magistral qu’il soit, n’est pas une levée de boucliers contre les revendications légitimes des grévistes mais plutôt un appel en direction d’Allah afin qu’Il fasse toutes choses bonnes pour vous et qu’Il souffle la sagesse des Saints Prophètes à l’ensemble de votre gouvernement dans la prise de bonnes décisions qui garantiront la stabilité de l’Ecole de la République et l’avenir de cette jeunesse en formation.

« L’individu qui devient l’esclave de ses envies et désirs et de cette façon, délaisse le souvenir d’Allah, perd très vite ses facultés de sagesse. Comme le dit le saint Coran, Sourate 59 الحشر AL Hashr « le grand rassemblement » Verset 14

Prof Alger Jean-Francis Ekoungoun
Maître de Conférences en littérature comparée.

* Le chapô est de la Rédaction de même que le choix de la photo d’illustration.

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