Focus/ Justice juvénile à Bondoukou, l’irresponsabilité des pères, un cas récurrent

Les locaux du SPJEJ de Bondoukou pour plus de confidentialité des écoutes (DR)

Le Service de Protection Judiciaire de l’Enfance et de la Jeunesse (SPJEJ)  de Bondoukou est le plus confronté aux cas d’abandon des charges des enfants par les pères de familles. Il gère aussi, entre autres, des situations liées à la délinquance juvénile. Pour faciliter le travail des agents, l’Unicef avec l’appui de l’Union européenne a offert un nouvel local et du matériel.

Mme A. S. vit  au quartier Benso de Bondoukou. Son enfant de 4 ans est partie prenante dans une affaire en justice. Motif : abandon des charges par le père.  « Nous étions dans un mariage arrangé par la famille. Mais entre nous, ce n’était pas vraiment rose. Quand notre enfant est né, le père a abandonné les charges et je suis retournée en famille.  Je m’occupais seule de l’enfant sans grands moyens. Un jour, j’ai décidé d’expliquer mon problème à la justice », se confie-t-elle à lemediacitoyen.com ce 16 mai 2019.  Ce, à l’occasion d’échanges organisés par le Service de Protection Judiciaire de l’Enfance et de la Jeunesse (SPJEJ) à la préfecture.

  A.S. explique que la justice a tranché en faisant une proposition. « On lui a demandé une somme par mois. Il dit qu’il ne peut pas. Mais il s’est engagé à donner moins, c’est-à-dire 15 mille F CFA par mois. Il déposait au début mais depuis un moment, il a arrêté.  Souvent, il saute des mois ». Aujourd’hui, son cri de cœur est de voir régulièrement versée la somme due.

Les cas comme celui de Mme A.S. sont légion dans la localité. A en croire une source judiciaire locale, les cas de non entretien d’enfants  par les pères sont  une réalité socio-culturelle. « Cela est dû aux pesanteurs sociales dans la zone. En général, le monsieur fait la navette entre ses deux femmes. Les enfants sont abandonnés à la charge des mamans », note la source.

Ibrahim, lui, a vu son cadet âgé de 18 ans, confronté à la justice dans une affaire de viol collectif. A l’en croire, son frère fut accusé car l’affaire se serait déroulé sous leur toit. « Finalement, les parents de la fille ont retiré leur plainte et mon frère a été libéré », confie-t-il. Aujourd’hui, Ibrahim se soucie pour l’insertion sociale de son petit frère.  Et le sort de la présumée victime de viol collectif est lui aussi à prendre en compte.  A l’instar de Mme A.S., il est invité aux échanges par le staff du SPJEJ de Bondoukou ce 16 mai 2019.

 

Facilitation des procédures, l’appui de l’Unicef

Comme quoi, en dehors de l’enfant victime, la justice est aussi confrontée au cas de l’enfant infracteur. Et la justice juvénile veut que, qu’il soit auteur supposé d’infractions pénales, victime de violences, l’enfant ou l’adolescent  soit assisté. Il en est de même s’il est impliqué dans une procédure judiciaire civile ou simplement témoin dans une procédure judiciaire pénale ou civile.

Pour faciliter le travail des agents du SPEJ de Bondoukou, l’Unicef avec l’appui de l’Union européenne a offert un nouvel local.  Situé au sein du tribunal de la ville, il favorisera plus de confidentialité et facilitera les procédures d’assistance aux enfants et adolescents impliqués dans une affaire. L’ouverture du service de Bondoukou le 17 mai 2019  s’annonce comme un pas de plus dans le respect des droits des enfants.

 

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Interrogé par lemediacitoyen.com, N’guessan Sako Hugues Hervé, conseiller d’éducation surveillé explique l’impact escompté. « Ces nouveaux locaux participeront à la confidentialité des écoutes des parents. Ils seront reçus dans un cadre beaucoup plus intime. Ils se confieront plus facilement par rapport à nos anciens locaux où nous étions 8 dans les bureaux. Cela permettra d’être plus efficace car les parents des bénéficiaires ne feront plus de la rétention d’information », comptabilise-t-il.

Diabo Kouakou Elvis, président de la Jeunesse communale de Bondoukou, quant à lui, s’en réjouit : « La cellule de la protection judiciaire de l’enfant et de la jeunesse est d’une importance capitale. L’ouverture des locaux au sein du tribunal de Bondoukou est une grande satisfaction pour nous. Cela permet de régler les problèmes liés à l’enfance et à la jeunesse. A côté, de cela, nous-mêmes nous menons des activités afin de canaliser la jeunesse de Bondoukou », note-t-il.

Selon les chiffres officiels, entre 2016 et 2018, 20,700 enfants ont bénéficié de cette assistance judiciaire  dans 8 tribunaux qui disposent de ce service. Ce sont les tribunaux du Plateau,  de Yopougon, de  Bouaké, de Man, de  Guiglo, de Korhogo, d’Odienné et de Soubré. C’est l’aboutissement d’un processus qui a démarré depuis 2012 avec l’appui de l’Unicef. Selon Sophie Léonard, représentante adjointe de l’Unicef en Côte d’Ivoire, « c’est environ 450 millions de F CFA qui ont été consacrés depuis 2012 à l’élaboration de la politique nationale, au renforcement des capacités des services judiciaires et à la formation des magistrats et du personnel de protection judiciaire de l’enfant ». Selon elle, L’UE a soutenu à hauteur de  78,5 millions de F CFA l’installation de 4 SPJEJ.

 Les SPJEJ travaillent également à la réinsertion des mineurs placés en détention ou sous garde provisoire par la justice. Il est présenté comme le visage humain de la justice. « Ce service est venu pour être le visage social de la justice. L’éducateur n’est pas un magistrat. Il n’a pas la rigueur du magistrat. Il est plutôt considéré comme un travailleur social. Il se fond facilement dans la population et il devient un tampon entre les familles et le magistrat. Il connait le magistrat puisqu’il est dans le milieu judiciaire. Il atténue l’effet de la rigueur du magistrat en allant vers les populations », se félicite la directrice de la protection judiciaire de l’enfance et de la jeunesse au ministère de la Justice et des Droits de l’Homme.

Nesmon De Laure, envoyée spéciale

Lemediacitoyen.com

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