Terrorisme aux frontières ivoiriennes, Kafolo la porte d’entrée ? Le décryptage de Paul Auguste Koffi, chroniqueur

    Terrorisme.  En un an pratiquement, la Côte d’ivoire se trouve frappée deux fois par des attaques terroristes, au même endroit. Et pourtant, des dispositions existent. De sources officielles, le pays a déjà, à de nombreuses reprises, déjoué des attaques sur son sol. Paul Auguste Koffi, chroniqueur politique à Lemediacitoyen analyse la situation. 

        Il n’existe aucune définition légale du terrorisme. Le monde n’arrive pas à s’accorder sur une définition du terrorisme.  Toutefois on peut présenter le terrorisme comme une stratégie mise en place de façon consciente dans le but de rependre la terreur en posant des actes d’une grande violence ou en menaçant de les poser. Le but est d’atteindre des objectifs politiques, religieux ou idéologiques en intimidant la population, en leur envoyant un signal fort. 

         En un an pratiquement, voilà deux fois que la Côte d’ivoire se trouve frappée par des attaques terroristes, au même endroit. Et pourtant, des dispositions existent. De sources officielles, le pays a déjà, à de nombreuses reprises, déjoué des attaques sur son sol.                         Cependant, tout porte à croire qu’elles ont été déjouées autour d’infrastructures économiques fortes ou de lieux touristiques importants ou encore dans de grandes villes sans que plus d’informations ne soient transmises. Le terrorisme prospère dans des zones où l’Etat semble absent. Ainsi, des symboles de l’Etat dans des zones reculées suffisent bien aux terroristes pour mener leurs actions de terreur. Le dispositif  logistique et humain en place pour la surveillance des frontières est visiblement défaillant. Il n’a pas, pour  l’instant, et de notre point de vue,  fait l’objet d’un traitement particulier même si aucun pays n’est à l’abri du terrorisme et qu’il  n’y a pas de probabilité juste ou d’anticipation à 100%.   

La katiba Macina

    Des interrogations subsistent. Ces attaques seraient-elles politiquement motivées ? Que recherche la « katiba Macina » ce groupe terroriste suspecté dans ce harcèlement et ces attaques sporadiques ? Mais surtout, comment une soixantaine d’individus peuvent-ils se déplacer de nuit dans une zone surveillée par quatre différents pays, quelle est leur source de financement ? Auraient-ils il un soutien populaire ?

       Comme évoqué précédemment, le terrorisme prospère dans des zones où l’Etat est absent. La pauvreté au sahel est donc un facteur important de la présence terroriste. Les groupes terroristes et de trafiquants développent la convergence des actions menées, la cohabitation et la coopération.

Le système hawala et la question du soutien populaire 

    Il est bien connu que le « système hawala » constitue un moyen simple et efficace de financement du terrorisme. C’est un système traditionnel de paiement informel encore très présents dans certains pays notamment l’Afghanistan et au Pakistan. Il est très probable qu’il soit utilisé par les groupes terroristes au sahel. Nombreux sont les groupes terroristes au sahel qui ont fait soit allégeance à « al qaida » soit au groupe « état islamique ».           Dans des zones ou l’Etat est absent, ce système d’entraide par redevabilité  permet donc  à de nombreuses familles de vivre. Les « sarrâfs » ou donneurs d’ordre qui gèrent ce réseau se substituent donc à l’Etat dans une certaine mesure. 

           On sait que l’Afrique est un continent « communautariste ». C’est à dire que la communauté a préséance sur l’individu. Il est donc facile pour quelqu’un qui a les moyens (les terroristes) de financer un projet ou de financer un mariage. D’aider à trouver du travail à des jeunes qui derrière deviennent redevables, se fidélisent à ces individus et ainsi ne les dénoncent pas. Toutes choses qui permettent de faire prospérer ce genre d’attaques qui auraient pu être déjouées par le soutien populaire.

   De facto, il n’y a pas de soutien populaire puisque pas de villes ou de villages qui ont fait allégeance aux terroristes. On n’aurait plus parlé de terrorisme dans ce cas mais de rébellion voire de guérilla. Toutefois, il y a vraisemblablement des gens qui les soutiennent en interne. 

    Aussi, Abidjan et son port sont les principaux points d’entrée et de sortie des productions maliennes et burkinabés. Pour rappel, la première attaque de Kafolo eu lieu quelques semaines après une importante saisie de cocaïne devant transité par la Côte d’Ivoire puis par le sahel avant de rejoindre l’Europe. C’est de nouveau le cas avec cette saisie record de plusieurs tonnes de cocaïne dans les eaux du golf de Guinée par la marine française, grâce au concours de plusieurs services de renseignement de police, dans un navire devant arriver quelque jour plus tard au port d’Abidjan. L’idée que ces groupes terroristes soient financés par le trafic de cocaïne qui transite par la Côte d’Ivoire reste entière, une piste à explorer. 

      Le terrorisme est un phénomène actuel mais pas le produit des temps modernes. A titre illustratif : 

* Dans la Rome antique, Jules César combattait déjà les terroristes ; 

*Au 18e siècle dans le cadre de la révolution française tous ceux qui menaient la contre révolution étaient pourchassées. L’on avait même instauré l’Etat de terreur entre 1789 1792 ;  

*Au 19e siècle le terrorisme a été perpétré par les anarchistes (Naradnaiaa voilà – ‘’la volonté du peuple’’. Plus récemment, ce sont les évènements du 11septembre aux USA qui ont montré un autre visage du terrorisme, certains responsables politiques américains ont parlé du nouvel ordre mondial. 

         Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, des pistes de solutions s’offrent à nous. Il faudrait entre autre, mieux impliquer les populations dans les prises de décisions par des dialogues communautaires. Les décisions prises du haut vers le bas (Top-Down)  ont montré leurs insuffisances. Le militaire à lui seul ne suffit pas pour endiguer le problème. C’est un problème multi dimensionnel.  La sécurité est polysémique. Elle fait à la foi référence à l’absence de danger imminent, à l’outil étatique de maintient de l’ordre (police, gendarmerie, armée) mais aussi à une demande populaire (sécurité du logement, sécurité sanitaire etc.). 

           La défense n’est donc qu’un objet pour parvenir à la sécurité. Il faut donc œuvrer au renforcement de la présence et de l’autorité de l’Etat dans les zones ou peuvent prospérer le terrorisme par une redistribution équitable des richesses.

 

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       Enfin, il faut une mutualisation des forces ouest africaines, surtout au niveau du renseignement. De meilleurs échanges d’informations entre les Etats et des accords de droits de poursuite militaires à l’intérieur des Etats sont entre autres des moyens de freiner l’avancée du terrorisme aux frontières ivoiriennes et dans le sahel. 

       Enfin, toutes nos pensées vont vers les familles des victimes et à tous les militaires en ces moments difficiles. Rien ne peut remplacer la douleur mais les mots de fraternité sont notre moyen pour vous soutenir. 

       Merci à vous, morts en défendant nos valeurs. Courage à vos familles qui peuvent être fières de vos sacrifices. 

Par Paul-Auguste Koffi, politologue, chroniqueur Média Citoyen 

Lemediacitoyen.com 

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