La biodiversité, c’est la diversité de la vie et celle-ci procure beaucoup de services à l’homme. Ces services permettent à l’homme de vivre : manger, se soigner, s’éduquer, se divertir. Pour aider à conserver durablement la biodiversité, les scientifiques ont mis sur pied le musée de la biodiversité. Il permet de toucher, de voir tous les travaux de recherche qui sont faits sur la biodiversité. Visite guidée de ce musée particulier situé à Bingerville, à la périphérie d’Abidjan.
En Côte d’Ivoire, le musée de la biodiversité est situé au pôle scientifique et de l’innovation de l’université Félix Houphouët-Boigny à Bingerville. C’est un outil important en ce qu’il témoigne des travaux de recherches qui sont faits sur la thématique. Cela permet aussi de capitaliser sur tous les acquis de la recherche scientifique. Dans ce musée, il est question de conservation de la biodiversité, de gestion durable de celle-ci.
Dans un musée de la biodiversité il est question de prendre tous les travaux spécifiques qui sont faits et d’essayer de capitaliser, de présenter quelque chose de global sur la biodiversité dans son ensemble. C’est ce qui est fait dans le musée. « Il traite de tous les grands concepts de la biodiversité, toutes les grandes théories et il le présente de manière succincte tout ce qui est fait de manière globale sur la biodiversité ». C’est ce qui ressort deS explications du professeur N’golo Abdoulaye Koné, spécialiste en écologie et conservation de la biodiversité.
À l’en croire, parmi les spécificités présentées dans le musée, il y a les aspects « comprendre la biodiversité », ensuite « l’utiliser ». Aussi « comment estimer la biodiversité » et enfin l’aspect « la biodiversité en danger ».
Dans comprendre la biodiversité, celle-ci est définie. La diversité biologique est souvent assimilée à la diversité des espèces. Ce terme se réfère pourtant à tous les niveaux de l’organisation, même l’homme en fait partie. Il part des gènes jusqu’aux écosystèmes. Le musée présente ce qui est connu en matière de biodiversité et ce qui ne l’est pas. Ainsi on estime à environ 2 millions le nombre d’espèces biologiques dans le monde mais on ne connaît pas encore le dixième. Ce qui montre qu’il y a un énorme travail de recherche à faire.
L’homme ignore en grande partie le potentiel en matière de biodiversité sur la planète. Pourtant, son action détruit les espèces dont certaines regorgent des remèdes aux maladies.
Il y a aussi d’un côté la perte des gènes. Quand on prend l’ADN, c’est comme les lettre de l’alphabet. Quand certaines lettres de l’alphabet manquent, on ne peut pas écrire tous les mots. Alors que les gènes ont leur importance. Par exemple, l’humain peut prendre un gène chez la grenouille pour lutter contre certaines bactéries. Car la grenouille vit dans les marres alors que l’homme risque de contracter des infections au contact de l’eau des marres. Ainsi, avec la science, l’homme pourrait emprunter à la grenouille des gènes et ne pas avoir d’infections fongiques ni bactériennes au contact de l’eau des marres. Cet aspect est aussi représenté dans le musée de la biodiversité.
Le musée de la biodiversité est un instrument didactique. Il est fait pour les élèves, ceux du primaire, mais aussi les lycéens, les collégiens et les étudiants. Car il est fait pour les emmener à comprendre la biodiversité avec des termes moins scientifiques. Tout est simplifié, pour le grand public. C’est une vulgarisation de la recherche scientifique faite sur la biodiversité.
Dans le musée, la forêt est également symbolisée. La biodiversité dans son ensemble se trouve représentée dans ce musée. Les services écosystémiques y sont également exposés. Ceux-ci permettent de vivre et de faire fonctionner la société. Ce sont toutes les contributions et les avantages directs de la nature pour l’humain. Par exemple, il y a l’arbre du baobab dont le fruit, les feuilles et l’écorce sont consommés. De même que le rônier qui sert à faire des éventails. Les espèces telles l’hibiscus qui sert à faire le Bissap, un jus naturel prisé en Afrique de l’ouest, le néré un fruit local, sont également exposées au musée de la biodiversité. On peut voir dans les vitrines, des calebasses, du fonio, l’arbre du karité et les produits dérivés, etc.
Selon le professeur N’golo Abdoulaye Koné, « l’on n’est pas encore arrivé à utiliser de manière conséquente notre biodiversité en Afrique. Si nous arrivons à créer des chaînes de valeur autour de ces produits, le marché local s’en porterait mieux, rien que pour le karité qui rentre dans la fabrication de beaucoup de produits cosmétiques ».
À côté de ces bénéfices directs de la biodiversité, il y a les bénéfices indirects. Par exemple, la pollinisation des arbres fruitiers et les plantes à fleurs qui produisent les fruits et légumes. C’est est un service (gratuit) de la nature : les insectes vont polliniser les cultures, ce qui permettra à l’humain de manger.
Le musée interpelle aussi sur le fait que la biodiversité est en danger. Pour le professeur N’golo A. Koné, elle est en danger pour plusieurs raisons. « C’est surtout à cause des humains. Car pour pouvoir vivre, l’homme a besoin de tuer la biodiversité ». Également directeur de la station de recherche du parc national de la Comoé, l’universitaire observe que la biodiversité est menacée d’extinction, notamment du fait de l’agriculture : « Dans les années 56, on avait environ 16 millions d’hectares de forêt. Avec l’agriculture, on est à environ 1 million 800 mille hectares de forêt aujourd’hui. On a perdu en l’espace de 50 à 60 ans, presque tout notre couvert forestier ».
Aussi, l’homme produit beaucoup de gaz à effet de serre. Les gaz à effet de serre font qu’il fait de plus en plus chaud sur la terre, cela a une conséquence sur la terre. Cette conséquence fait qu’on arrive à l’aridification des terres, la sècheresse, on arrive plus à cultiver la terre. Cette sécheresse est également représentée au musée. Elle a pour but d’interpeller les visiteurs.
Enfin, une solution orientée nature pour préserver la biodiversité est aussi présentée au musée de la biodiversité. « À travers des activités, on a mis en place des solutions de sensibilisation. On sensibilise sur l’utilité, l’importance de la biodiversité, on essaie de former et de renforcer les capacités sur la thématique, de sorte à ce que des solutions novatrices mises en place par certaines personnes soient vulgarisées et servent de cas d’école », explique l’expert. C’est le cas de la technique développée par Yacouba Sawadogo, agriculteur burkinabé. Ce cultivateur communément appelé « l’homme qui arrêta le désert » est également lauréat du prix nobel alternatif pour son combat contre l’avancée du désert. Il a mis en œuvre une technique pour donner vie à un sol mort, appelé le système Zaï. Il prend le sol mort, il creuse des trous, il y met des débris végétaux (feuilles mortes, brindilles, et.c), il arrose. Lorsqu’il voit qu’il y a un micro climat favorable qui s’est créé, il sème son mil. Et il réussit à récolter. Cette technique est aussi exposée aux visiteurs qui pourraient s’en inspirer.
L’impact de posséder un musée de la biodiversité est énorme en ce que c’est un outil de promotion de la biodiversité. En général, quand on parle de biodiversité, quand on parle de sa valeur, ce n’est pas saisissable. Non seulement le musée est un outil qui permet de créer des vocations, mais il permet également de faire prendre conscience sur les menaces que courent la biodiversité. Il permet également aux jeunes de vouloir embrasser cette carrière d’étude de la biodiversité et du changement climatique.
En Côte d’Ivoire aujourd’hui, la biodiversité est principalement concentrée dans les parcs nationaux et réserves naturelles. Il y a un réseau de parcs et de réserves tels que le parc national de Taï, le parc national de la Comoé, qui sont des réserves de biosphère et patrimoine mondial de l’UNESCO. Il y a également la réserve scientifique de Lamto, la réserve des îles éhotilés qui sont des éléments très importants de conservation de la biodiversité. « C’est seulement dans ces parcs et réserves que se concentre la biodiversité en Côte d’Ivoire. Ce qui ne devrait pas être le cas », déplore le professeur N’golo. Selon lui, l’une des choses à faire, c’est d’augmenter la taille de ces aires protégées au risque de perdre toute notre biodiversité. Cependant, ces aires protégées font l’objet d’orpaillage clandestin notamment au niveau du parc national de la Comoé. « Il serait bon d’essayer de revoir notre mode de gestion et d’accroître l’efficacité de notre mode de gestion de ce qu’il nous reste comme biodiversité en Côte d’Ivoire », exhorte-t-il.
À cet effet, l’une des solutions selon l’expert, en plus d’accroître le nombre d’aires protégées en Côte d’Ivoire, il faudrait donner les moyens à l’institution de gestion qui est l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR) pour gérer et sécuriser les parcs et réserves. Il faut également créer l’éco-tourisme aussi bien interne qu’externe. Faire la promotion de la biodiversité de sorte à ce que les ivoiriens eux-mêmes voient et connaissent la valeur de leur biodiversité, ce qui permettra de réduire sa destruction. S’ils arrivent à aimer la biodiversité, celle-ci sera mieux gérée. « Les connaissances locales des populations leur permet de n’attendre aucun conseil. En effet dans nos villages, 80% de soins médicaux sont faits à base de plantes. Dès le moment où c’est le cas, les populations doivent savoir que si les espèces disparaissaient, elles en pâtiraient », conclut l’expert.
En attendant, le musée est ouvert aux visiteurs et à tous ceux qui s’intéressent et aimeraient mieux cerner la notion de biodiversité de manière plus simple.
Délorès Pie
Lemediacitoyen.com
Ce reportage a été réalisé avec l’appui de Eburnie Today et l’ONG IDEF dans le cadre du projet “Building the biodiversity media champion network in Côte d’Ivoire” soutenu par Earth Journalism Network et Internews Europe.
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