Analyse/ débats CNI, Non, la politique de la chaise vide n’est pas en cause ici / Par Dr Paul Agoubli, enseignant

À la marge des débats actuels sur l’opportunité du versement d’une contrepartie financière pour le renouvellement de la carte d’identité des Ivoiriens, se posent depuis hier des questions de principe dont la plus récurrente porte sur la dénonciation tous azimuts de la fameuse « politique de la chaise vide » comme si ce concept n’avait été édicté que pour la Côte d’Ivoire tant cet argument revient épisodiquement pour justifier tel ou tel travers autocratique, voire doctoral.

Le vote des députés est-il donc la conséquence de l’absence ou de la faible représentation de l’opposition dans l’hémicycle ? Certainement répondront beaucoup. Complexifions la question par une petite dose d’éthique : les députés ivoiriens présents à l’assemblée nationale hier devaient-ils voter une telle loi même en l’absence d’une opposition significative ? Si on excepte les arguments objectifs (le coût de la confection et toutes les charges annexes trop lourdes pour l’État ) dont nous ne connaîtrons pas la teneur précisément parce que le RHDP n’a jamais jugé bon d’éclairer les débats que suscite sa gouvernance, force est de constater du point de vue des populations pour la plupart démunies, que cette mesure est injuste et sera cause d’exclusion. 

Si donc les députés (dont beaucoup ont obtenu leur mandat dans des zones particulièrement défavorisées) ne méconnaissent pas l’état d’indigence et/ou de dépendance d’une bonne partie de la population, on peut se demander à qui ceux-ci voulaient être confrontés pour juger de l’inopportunité de leur décision de faire payer la prochaine carte nationale d’identité à 5000 frs. CFA, qui-plus-est dans les conditions légales et contractuelles opaques abondamment documentées dans la presse qu’ils n’ignorent pas ? 

Non, la politique de la chaise vide n’est pas en cause ici, tous les sièges de l’assemblée Nationale étant bien occupés au moment du vote ; c’est plutôt du côté du bon sens, du courage de ses opinions et de la défaillance de la raison solidaire qu’il faut situer ce qu’il pourrait convenir de nommer un lâchage spectaculaire.

N’ayons pas de cesse de rappeler que les députés (le mot veut dire envoyé) sont d’abord les représentants du peuple (leurs envoyés donc) à qui doit aller en premier leur solidarité avant qu’elle ne se porte sur des logiques partisanes.

 Or est-ce que chaque député s’est enquis préalablement des aspirations des populations sur la question qui était discutée ? Ne peut-on pas penser, quand on lit les réactions depuis ce que le porte-parole du gouvernement a qualifié de rumeur, que le peuple était hostile à une telle mesure ? De plus, le député Alain Lobognon a bien introduit un amendement dans le texte qui a été soumis à la représentation nationale pour obtenir la gratuité du document pour les populations, on ne peut donc pas invoquer la raison d’une absence d’opposition car celle-ci ne se juge pas à la seule présence d’une partie adverse dans l’arène politique; elle se mesure aussi et surtout dans toute réserve dialectique à laquelle votre volonté est confrontée et qu’elle doit dépasser avant de s’exprimer.

Les députés ont donc fait ce qu’ils avaient à faire; que le FPI, Lider ou les autres n’aient pas été là n’est pas la question. 

Toute cette mauvaise foi arrive à son heure et surtout chez les robins ivoiriens d’aujourd’hui pour montrer au peuple de Côte d’Ivoire que les politiciens constituent une classe sociale à part entière dont tout le reste du corps social est les tiers-état. Il y a peut-être nécessité, en face de cette noblesse robine complètement disqualifiée d’avoir des figures d’autorité plus crédibles, sortes de robins alternatifs (la légende a bien forgé son robin des bois) qui ne prennent pas prétexte d’un avantage numérique pour manquer à leur devoir mais qui questionnent durement leur conscience avant d’agir. 

Par Dr Paul Agoubli, enseignant

Lemediacitoyen.com       

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